UTMB 2014

Abandon à Courmayeur au bout de 12:22:39 de course pour 77.7 km et 4337D+

Arrivé à Courmayeur à 5h54, avec pourtant 6h06 d’avance sur les barrières horaires, je ne repartirai pas. Pourquoi ? Y a-t-il des raisons objectives ou ai-je tout simplement manqué de motivation et d’envie ? Je ne sais toujours pas mais quoi qu’il en soit, voici le récit de ma course.

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Pour ma 4ème participation à l’une des courses de l’UTMB, nous commençons à être rodés si bien qu’avec Florence, Robin et mes parents, après avoir déposé mon sac qui doit être transporté à Courmayeur, nous arrivons à la Place du Triangle de l’Amitié avec presque 2 heures d’avance.


L’émotion monte peu à peu, je me fais prendre en photo puis vient la musique désormais mythique de Vangelis avant le départ donné à 17h31. La foule est toujours aussi impressionnante malgré la pluie qui tombe depuis un petit moment. Je range vite la veste mais perds une épingle sur mon dossard dans la bataille. Ça ne m’était encore jamais arrivé! Est-ce un signe ? Je l’accroche grâce à une petite astuce qui m’évite l’utilisation d’une épingle à nourrice.


Comme prévu, je saute le ravitaillement Aux Houches et nous attaquons la montée raide, en forêt, en direction du Délevert. Je connais cette partie pour l’avoir déjà faite en 2012. Je remets la veste car la pluie reprend de plus belle. Comme en 2012, je me prends un gadin dans la descente raide, glissante et souvent en dévers. À Saint Gervais, l’ambiance est au rendez-vous. Je tape dans les mains des enfants qui nous les tendent au passage. Mon gobelet enfoui dans ma poche de sac, dans la précipitation, je décide de me contenter de mon reste de boisson pour aller aux Contamines. Grossière erreur ! Peu de temps après, une soif inhabituelle me tombe dessus. Je bois à petites gorgées et heureusement j’arrive plus vite que prévu aux Contamines. Mam est là derrière les barrières, Papa, avec son ticket assistance, a pu entrer dans la zone prévue à cet effet. Je m’assois, fais le plein de boisson énergétique et prends 3 gels pour la nuit. Je récupère aussi une veste seconde couche sèche et Papa me rappelle de prendre ma nouvelle frontale NAO. À la sortie des Contamines, non loin de l’appartement, malgré la pluie battante, j’aperçois la capuche pointue blanche de Robin dans les bras de Florence. Je les embrasse tous les 2 et repars boosté mais conscient que maintenant je suis seul pour toute la nuit. Je retrouve l’ambiance d’il y a deux ans à Notre Dame de la Gorge avec la musique et un gros feu au début du chemin romain.


La montée à la Croix du Bonhomme est longue et déjà, je me dis que ça ne va pas. Peu d’entrain, l’impression d’être déjà fatigué et je vacille en me rattrapant avec mes bâtons. Je veux déjà abandonner aux Chapieux. Je me refais un peu la cerise dans la descente et me dis que je dois essayer de pousser jusqu’à Courmayeur. Ça sera plus facile de rentrer sur Chamonix et je pourrai en discuter avec mon assistance. Je me fais contrôler 3 matériels obligatoires de mon sac (veste de pluie, 2ème puce électronique accrochée à mon sac et téléphone portable). Le solide ne passe pas bien mais je me force un peu pour boire une soupe et fais le plein de boisson énergétique avec la dose que j’avais récupérée aux Contamines. J’essaye un fameux tuc que l’on trouve sur tous les ravitaillements en trail mais que je n’ai jamais testé. C’est vrai, ça, ça passe ! Je vérifie mon plan de route et suis surpris de voir que j’ai encore quelques minutes d’avance sur ce que j’avais prévu. Mais avec 15 min d’avance aux Contamines, mon rythme s’est tout de même fortement ralenti. Le chemin s’élève doucement sur une route goudronnée. C’est le début de la montée au col de la Seigne. J’y vais doucement en alternant marche et course, la montée se fait bien mais je n’arrête pas de me faire doubler. Là encore, je manque d’énergie. Pourtant, le temps ne me semble pas long. J’essaye de profiter malgré tout.


La descente au lac Combal passe bien. Je m’arrête pour boire un peu mais le solide ne passe toujours pas bien. Un peu de plat m’amène jusqu’au pied de ma dernière montée. Je discute un long moment avec un Vosgien qui a déjà terminé 7 fois l’UTMB. C’est sympa et ça passe le temps. Il me confirme que le manque de sommeil peut être mortel mais essaye de me motiver en me disant qu’il ne reste plus que le Grand Col Ferret, les autres difficultés passant mieux. Mais je ne peux m’enlever de l’esprit qu’à Courmayeur, il restera quand même 90 km alors que j’ai déjà du mal après seulement 70. Physiquement, ça va, donc j’imagine que je pourrais pousser encore un peu mais à quoi bon. Franchement le plaisir n’y est pas et à Arnuva ou même la Fouly, je devrai me débrouiller seul pour rentrer, mes parents m’attendant à Champex. D’après mes estimations, c’est 9h12 sans les voir et dans mon état, ça sera probablement bien plus. Pour le moment, je vais bien, aucun bobo, par contre, si je continue … Ne devrais-je pas être raisonnable pour une fois ? Je n’ai pas trop forcé et je pourrai vite reprendre une activité physique.


Nous atteignons l’arête Mont Favre et de mémoire, le Col Chécrouit se situe peu de temps après, dans la descente. Mais il nous faut un bon moment pour l’atteindre et quelques lacets bien raides.


Je prends mon temps m’asseyant même quelques secondes pour demander à une coureuse avec qui j’ai fait pas mal de yoyo si ça va. Oui, mais j’ai mal aux genoux, me répond-t-elle. J’apprendrai plus tard qu’elle abandonnera également à Courmayeur. Je laisse le Vosgien partir préférant faire ma descente tout seul.


Je pense à Mam qui a souffert sur son tour du Mont Blanc dans cette descente. En effet, elle est raide et longue mais techniquement facile, sur des sentiers relativement mous, en sous-bois. Arrivé dans les ruelles de Courmayeur, malgré le fait que j’y suis allé vraiment doucement, j’ai les jambes raides et je dois me forcer à courir lentement. Je manque clairement de sorties longues.


En arrivant, je récupère mon sac. Mes parents sont au rendez-vous, et je les informe que je pense arrêter. Je me change pour être au sec. Papa me conseille de monter un moment et me reposer. J’y vais. Bonheur, il y a des pâtes à la sauce tomate. J’en avale une assiette et vais dans le coin repos, juste pour la bonne conscience. Je n’arrive absolument pas à dormir, d’une part parce que mes jambes me font mal et d’autre part parce que je me pose encore 100 mille questions. Un bénévole vient me couvrir et veille à ce que nous ne dormions pas trop de peur que nous soyons trop dans le pâté au réveil. Je l’informe que de toute façon, je pense arrêter et il me propose d’essayer de dormir plus longtemps. Non, je n’ai pas envie. Je me dirige vers l’organisation et m’assois à une table juste devant pour informer Florence par téléphone. Enfin, ils me coupent mon dossard et prennent la puce sur mon sac.


Déçu et rassuré à la fois, je prends le bus avec mes parents jusqu’à Chamonix.


Après réflexion, je pense aussi que je ne suis pas parti avec la bonne philosophie. Pour une fois, j’avais bien planifié mes temps de passage, arrivant, par exemple, à Courmayeur avec seulement 2 min de retard ! Mais, j’aurais dû vivre ma course sans me soucier de ma vitesse. Partir avec l’idée de faire une grande balade de près de 40 heures en montagne.


Quoi qu’il en soit, cette course a tout de même été une très belle aventure qui m’a motivée pour remettre ça, d’abord sur un format plus court, bien sûr mais pourquoi pas un jour sur ce format …


Merci beaucoup à Florence pour avoir veillé sur Robin et à mes parents pour m’avoir soutenu.


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